La reine de vengeance by Christophe Lambert

Auteur:Christophe Lambert [Lambert, Christophe]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantasy
Éditeur: Mango Jeunesse
Publié: 2016-07-14T20:02:04+00:00

CHAPITRE 22

Boadicée et les siens patientaient sur la crête de plusieurs collines pansues.

C’était là une bien singulière armée, avec ses hommes hirsutes, ses femmes dépoitraillées, vêtues de guenilles, ses guerriers équipés de fourches et de piques à broche. Les Icènes avaient utilisé une glaise bleu-vert pour se dessiner des signes sur le visage et les avant-bras.

L’attente s’éternisait, la brume peinait à masquer les émotions.

— C’est long, grogna Devan.

— Tais-toi, intima Boadicée, les nerfs tendus à se rompre.

L’air vibrait au rythme d’un cliquetis cadencé, celui d’une armée dont l’équipement en métal s’entrechoque avec une froide régularité. Des reflets de bronze perçaient la brume, de plus en plus nombreux. Les boucliers incurvés apparurent. Puis les lances tenues à l’horizontale.

Cohortes et centuries romaines avançaient en ordre de bataille, par groupe de cinq ou six cents hommes. Magnifiques, implacables, l’image même de la force en mouvement.

La peur s’insinua dans le camp breton. En dépit de leur courage, les guerriers ne pouvaient être qu’impressionnés par cette armée qui marchait vers eux, calme et méthodique.

La brume s’effilochait. Les Romains firent halte au sommet d’une longue crête située à portée de baliste(23) de leurs adversaires. Entre les Bretons et eux, la plaine formait une vaste cuvette.

— On ne peut les attaquer tant qu’ils occupent une position dominante, décréta Dagos.

— Qui te dit qu’ils vont se jeter dans ton piège ? lança Devan.

— Ils sont trop confiants.

— Je me demande si ce n’est pas toi qui fais preuve de présomption.

Pour toute réponse, le chef des Coritani éclata de rire.

Les chevaux sentaient l’imminence de la bataille. Ils se cabraient, et on devait leur caresser l’encolure pour les rassurer.

***

Le général Cerialis montait une superbe jument blanche tachetée de gris. Il avait revêtu sa tenue d’apparat, comme pour un défilé. Le manteau pourpre et or drapé sur ses épaules lui donnait un air impérial. Après avoir longuement observé l’ennemi, il se tourna vers le magister peditum, commandant des unités à pied.

— Archers, dit-il.

L’ordre fut relayé de formation en formation. Les archers sortirent des rangs comme un seul homme.

— Nous allons voir ce que ces barbares ont dans le ventre, murmura Cerialis.

Les cordes se tendirent, par centaines. Un bras s’abaissa, et le bleu du ciel fut voilé par une multitude de traits sifflants.

***

— Boucliers ! hurla Boadicée.

Elle donna l’exemple en s’accroupissant sous l’ovale de bois et de fer censé la protéger. Une pointe traversa le bouclier, s’arrêtant à un centimètre de sa joue déjà balafrée. Un tintement lui indiqua qu’un autre projectile venait de rebondir sur le rond métallique. Le crépitement se prolongea encore quelques secondes, qui semblèrent durer un siècle. On aurait cru une averse de grêlons. Une dizaine d’hommes, pas davantage, furent tués ou grièvement blessés. Puis, d’un coup, les guerriers des trois tribus se redressèrent en poussant un cri à figer le sang. Ils hurlaient et cognaient sur leurs boucliers criblés de flèches. Le vacarme se propagea sur toute la plaine. Une seconde volée de flèches fut la réponse aux hurlements de défi. À nouveau, tout le monde s’abrita.

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